Azoulai 6

Publié le par 1A 08/09 notes

Séance n°6

Le système juridique de l’UE – l’autorité du droit communautaire

Introduction :

L’UE dispose d’un système de pouvoirs particuliers, mais aussi d’un système juridique propre. Le droit communautaire a une autorité particulière en Europe. On répète souvent que l’Europe s’est édifiée par le droit : d’abord, le droit est le cadre des rapports entre états au sein de l’UE, et les procédés de coercition, les actes d’agression, les actes de justice privée qui sont tolérés par le droit international public dans une certaine mesure, sont totalement exclus de l’espace européen. Les rapports entre états se règlent institutionnellement et diplomatiquement ou le cas échéant devant le prétoire de la CJCE. Ensuite, le droit est le moteur, la forme de l’intégration européenne, par le moyen de l’unification des règles nationales et par adoption de règles communes.
Les juristes véhiculent des représentations de l’intégration euro. Les moyens politiques, diplomatiques ne sont pas exclus de cet espace européen, n’ont pas disparu dans l’ordre des relations euro ; mais ils doivent tjrs composer avec les contraintes juridiques.

L’autorité du droit communautaire à le droit communautaire est doté d’un statut particulier au sein des ordres juridiques nationaux, le statut de DROIT INTEGRE au sein du droit des Etats Membres

Il a la prétention de s’imposer sur le territoire des Etats membres, avec une autorité égale et même supérieure à celle des droits nationaux.

Jurisprudence du CC : « droit communautaire est intégré à l’ordre juridique interne et distinct de l’ordre juridique international ».
Le droit communautaire n’a pas besoin d’être transposé pour être appliqué en France. Les autorités françaises doivent l’appliquer sans même se demander si les autorités des autres états signataires des traités l’appliquent aussi. Droit international = intergouvernemental, ne s’applique que sous condition de réciprocité.


Le droit communautaire se distingue de cela car impose sa présence par lui-même, sans médiation, c’est en ce sens que c’est un droit intégré, quasi-fédéral. On peut donc parler d’une AUTORITE : sans parler d’usage de la force ou de domination, on suppose une reconnaissance par les sujets de cette autorité. Ce n’est pas non plus une délibération, un dialogue : il y a quand même l’idée de supériorité.
Hans Gadamer définissait l’autorité : « la reconnaissance de la supériorité ».

Exemple : image de l’Occupation : le droit communautaire occupe les territoires des Etats membres, les champs juridiques nationaux. Occupation non pas forcée, mais consentie par la ratification des traités. Le droit de l’UE utilise les agents nationaux et les mobilise au service des objectifs de l’intégration européenne. Comme toute situation d’occupation, cette situation nécessite des relais, des collaborations à les juridictions nationales. Le droit communautaire donne à ces juridictions des pouvoirs pour le faire appliquer. Il existe aussi des phénomènes de rejet, de résistance contre ce droit communautaire.

Les instruments de l’autorité du droit communautaire

  1. L’Agent: la CJCE.

Institution apparemment modeste : article 220 CE : « La CJCE a pour tâche d’assurer le respect du droit dans l’interprétation et l’application du traité ».
En vérité, la Cour est un véritable pouvoir. Elle a un rôle essentiel de contrôle des Etats, des autres institutions communautaires et surtout parce qu’elle a un rôle en matière d’INTERPRETATION du droit communautaire. Elle donne le sens ultime des règles communautaires. Elle oriente, encadre donc les actions des acteurs politiques, économiques et sociaux dans la communauté.

L’organe juridictionnel

Institution composée de 3 organes :
- CJCE
- Tribunal de 1ère Instance des communautés euro

- Tribunal de la fonction publique européenne

Ne représente pas plus de 2000 personnes qui peuplent l’institution, se trouve à Luxembourg. Organe le plus important au sein de l’Institution = La CJCE.
Composition : nombre de juges = à celui du nombre des Etats de l’UE. Chacun des juges est aidé par 3 ou 4 référendaires, possède son propre cabinet. Idée de représentativité des pays semble contradictoire avec l’idée d’indépendance que doit avoir un tel organe. En vérité, on veut représenter toutes les cultures juridiques nationales pour faire du bon droit communautaire. Il le faut pr faire accepter le droit communautaire et les décisions de la CJCE.

Cour indépendante et impartiale. Il y a dans son statut un ensemble de règles qui assurent cette impartialité : garanties d’indépendance des membres, nommés pour 6 ans, inamovibles, décisions adoptées collégialement, délibérés en secret. Ce qui pose pb : règles de recrutement, de renouvellement des membres de la Cour. Formellement, les juges sont nommés d’un commun accord avec les gouvernements des états membres. En fait, chaque état propose son candidat, avalisé par l’accord entre les gouvernements. Procédures propres à chaque Etat. En Fce, traditionnellement, c’est un membre du Conseil d’Etat qui est envoyé comme juge à la CJCE.
Procédure controversée : Traité de Lisbonne
à prévoit un comité d’évaluation indépendant des candidatures qui donnera un avis sur les candidatures proposées par les gouvernements.

3 fonctions de la CJCE :
- Contrôle le respect par les Etats de leurs obligations communautaires
à recours en constatation de manquement (art 226-228 CE). Commission, gardienne des traités, peut saisir la CJCE pour lui dder de constater un manquement par un Etat à ses obligations communautaires. Si manquement persiste, la Cour peut prononcer des sanctions financières à l’encontre de l’Etat incriminé.
à La France en a fait les frais : en 2005 (12 juillet, arrêt Commission c/ France : amende de plus de 70 millions d’euros pour ne pas avoir organisé de contrôles sur les pêcheurs, qui permettaient de préserver les ressources halieutiques européennes).

- Contrôle des institutions communautaires, et de leur respect des règles communautaires. Ex : Arrêt Cadi du 3 sept 2008 : la cour a annulé un règlement du conseil, décision qui consistait à geler […]
Violation des droits fondamentaux protégés par l’UE.

- Assistance des juridictions nationales : si litige dans lequel est impliqué le droit communautaire, la juridiction peut suspendre la procédure et poser des q° d’interprétation ou concernant la validité du droit communautaire.

La cour rend un renvoi préjudiciel qui s’applique aux juridictions nationales. L’interprétation pourra ainsi peut-être régler le litige. Vecteur indispensable du droit communautaire. La CJCE s’est servie de ce moyen de coopération direct avec les juridictions nationales pour servir la cause de l’intégration, pour fournir des interprétations qui allaient dans le sens de l’unité euro. Jurisprudence communautaire = pouvoir. Pouvoir construit dans les années 60 à 80 grâce à l’audace de certains juges qui ont pris le parti de faire avancer la cause de l’intégration euro. Mais cela n’a été possible que parce que la Cour se trouvait dans un contexte politique favorable : paralysie du Conseil par la règle de ‘l’unanimité imposée par la Fce ds les années 60, consentement tacite des gouvernements qui comptaient sur la cour pr faire avancer l’intégration, mobilisation des grandes entreprises euro, mobilisation de certaines juridictions nationales qui ont utilisé le droit européen. Conjonction de forces convergentes pour soutenir l’action de la Cour. Elle a donc créé un ordre juridique autonome en réaction à tout cela. Elle a arraché le droit co à ses racines internationales, elle a explicité les fondements normatifs du droit co.
Elle a étendu les objectifs du droit communautaire et a affirmé la suprématie de cet ordre juridique sur les droits nationaux.
Elle a créé une sorte d’unité de sens, de valeur. Elle l’a fait pour empêcher que le droit co ne se perde, ne se fragmente ds l’espace européen composé d’ordres juridiques concurrents. Pouvoir accepté pendant longtemps, moins aujourd’hui car l’Europe c’est élargie, parce que les gains que les Eatts peuvent espérer de l’intégration sont moins visibles, parce que le Conseil a retrouvé ses pouvoirs et que les gouvernements n’ont plus la possibilité d’opposer leur veto au sein du conseil, parce que les opinions publiques se méfient du projet d’intégration.

Pouvoir contesté, 3 exemples parmi les 400 à 500 arrêts annuels de la CJCE :
- Arrêt du 5 juillet 2005 (Commission c/ Autriche) : La commission impose à l’Autriche de lever ts les obstacles à l’accès des étudiants européens au sein des universités nationales. Pb : universités autrichiennes sont surchargées de dde. Intérêt des allds : obtenir un diplôme en Autriche, plus aisé, de faire jouer l’équivalence des diplômes qui existent en Europe pour retourner en Alld. Autriche sait qu’ils ne contribueront pas

- Arrêt du 22 Novembre 2005 (arrêt Mangold) : A suscité la colère du pdt alld. Cour a mis en cause la juridiction allemande, qui restreint les CDD aux personnes de plus de 52 ans.

- Arrêt du 325 juillet 2008 (arrêt Métoc) : La CJCE oblige les états à admettre ss restriction sur leur territoire le séjour de ressortissants étrangers (pays tiers à l’UE, ici camerounais) dès lors qu’ils sont mariés à des citoyens de l’UE. Gouvernement danois considère que c’est une atteinte à sa politique en matière d’immigration. Mais pour la cour c’est un effet inéluctable des règles sur la citoyenneté euro. 

  1. La méthode : la « constitutionnalisation de l’ordre juridique communautaire

Moyens = doctrines forgées par la CJCE elle-même. Elles consistent au fond à faire admettre que les règles euro sont les règles constitutionnelles européennes, supérieure à ttes les autres.

Les principes : effet direct et primauté du droit communautaire

Effet direct : Arrêt Van Gend en Loos / LES DISPOSITIONS du droit communautaire sont invocables par les particuliers devant les juridictions nationales pour mettre en cause toute règle nationale contraire au droit communautaire.

à Le droit co est la chose des particuliers en Europe, qui peuvent l’utiliser pour mettre en cause tte règle nationale contraire. Lie les individus pour faire respecter l’autorité du droit co. Les individus deviennent des auxiliaires de la communauté contre les juridictions qui refusent d’appliquer ce droit.

Primauté : Costa c/ Enel : On dit aux juridictions nat qu’elles ont le droit de censurer toute règle nationale (règlementaire, législative, constitutionnelle) qui est contraire au droit communautaire.
à Assure l’effectivité du droit co.

2) Implications : effectivité et légitimité du droit communautaire

- Arrêt Siementhal (1978) le dit bien : la conséquence de l’effet direct et la primauté : « tout juge national a l’obligation d’appliquer intégralement le droit co en laissant inappliquée toute disposition éventuellement contraire de la loi nationale que celle-ci soit antérieure ou postérieure à la règle communautaire ».

- Arrêt Frankovitch (1991) : Non seulement le juge peut censurer le droit national contraire, mais il peut obliger l’état à accorder des dommages & intérêts à l’individu qui a été lésé par la violation du droit communautaire.

Autre implication : légitimité : le droit co s’applique directement avec effet de primauté a obligé la CJCE  a inclure des elts de légitimation pour faire accepter cette légitimité. Elle a donc inclus les droits fondamentaux ds le droit communautaire.
Elle a également introduit des principes de justice sociale dans la construction du marché commun, notamment égalité homme/femme.

La reconnaissance de l’autorité du droit communautaire.

  1. La reconnaissance par les autorités nationales

Les relais

Autorités nationales = appliquent quotidiennement le droit co.

Juges nat = « juges communautaires de droit commun ». Ils font respecter ces règles quotidiennement. S’ils acceptent de le faire c’est qu’ils y trouvent un intérêt : Cour donne du pouvoir aux juges ordinaires de première instance. Ex : Censurer la loi au titre du droit communautaire, ils n’ont pas ce pouvoir en temps normal + adresser des injonctions aux administrations + engager la responsabilité de l’Etat.

Pouvoirs fondés sur l’article 88.1 de la constitution française. C’est pour les juridictions nationales le fondement de leur pouvoir en matière de droit co.

Autre relais : les avocats (notamment avocats d’affaires) mobilisent les ressources de droit européen.

Les résistances

Ce sont notamment les juridictions constitutionnelles des états. Elles admettent généralement l‘autorité du droit communautaire, mais sous condition qu’il respecte les principes fondamentaux de l’ordre juridique interne, que ces juridictions ont pour fonction de préserver.
Ex : Conseil Constitutionnel français : « il doit respecter les principes inhérents à l’identité constitutionnelle de la Fce »
à réserve à la primauté du droit communautaire, théorie des « contre-limites » dans le droit italien.

Modèle de la résistance : Arrêt de la Cour de Karlsruhe (1993) relatif au traité de Maastricht : « Le transfert de compétences de la RFA à l’UE est subordonné au respect du principe d’attribution des compétences, aux principes démocratiques et au respect des droits consacrés par la loi fondamentale allemande de 1949 ».

Ce modèle s’est diffusé dans les E-membres, particulièrement dans les nouveaux pays entrés en 2004.

Parfois, la résistance va jusqu’à l’ignorance du droit co. En France, le Conseil d’Etat n’a admis la primauté du droit co qu’avec l’arrêt Niccolo de 1989. Aujourd’hui, position : Arrêt Arcelor (2007) : « Le droit co ne s’impose pas aux principes constitutionnels français, la constitution reste supérieure aux règles co, mais admet que le principe d’égalité de traitement trouve son équivalent dans la jurisprudence de la CJCE, que le droit euro protège de manière équivalente le droit fçais ».

Etats souverains veulent rester maîtres de leurs souveraineté, concurrents de l’ordre juridique européen supérieur. On passe d’un espace pluriel à un espace pluraliste à présomption de compatibilité par les organes nationaux entre les valeurs et les principes nationaux de l’ordre national & de l’ordre communautaire. Sous réserve, il y a compatibilité entre les principes constitutionnels et ceux protégés par l’ordre juridique euro. On limite ainsi le risque de conflit entre les ordres juridiques.

  1. La réception du droit communautaire

Question : autorité sociale du droit communautaire. Elle n’est pas donnée, c’est un droit étranger, élaboré à Bruxelles. Jean Carbonnier : « un droit venu d’ailleurs », « droit apatride ».

Sa légitimité tient dc à ses qualités :
- Qualité de droit commun

- Qualité de droit neutre

- Qualité de droit efficace économiquement/socialement, apporte des bénéfices aux sociétés euro.

Cette Intégration juridique est contestée socialement :droit co = symbole d’une Europe libérale, antidémocratique.

Publié dans Azoulai

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