Azoulai 9
Séance n°9
Le droit de la concurrence en Europe
Sujet délicat, matière à controverses. Politique et droit de la concurrence en Europe. L’intégration éco de l’Europe repose sur trois piliers : régime des libertés de circulation, assorti d’une politique d’harmonisation des législations nationales (droit du marché intérieur, à séance 9), régime de l’union économique et monétaire, phase d’achèvement de la construction éco (à séance 11) et le régime de concurrence.
Assurément le régime le plus contesté des 3. Ceux qui admettent la pertinence et l’importance de la construction euro rejettent en même temps le régime de concurrence, prévu à l’article 3G du TCE ou encore 90 TCE. Principe proposable aux Etats d’un marché ouvert ou la concurrence est libre. « Si il y avait qqch de pourri dans l’UE, c’est la concurrence ».
Au fond, ce droit serait le fait de la marchandisation de la société, la privatisation d’activités sociales, publiques, solidaires… La mise en place d’un système d’équivalences généralisées. Le droit de la concurrence serait solidaire d’une loi d’évolution qui ntransformerait tout en marchandises. Il y a une sorte d’idéologidation de la concurrence , d’une diabolisation du mot « concurrence ». Cela a des effets sociaux et politiques, notamment lors de la négociation du Traité de Lisbonne : Fce a demandé qu’on y retire la référence qui existait dans le traité constitutionnel : la référence à la concurrence dans les objectifs de l’UE. LA concurrence est désormais un simple protocole annexé au traité. Le mot disparaît mais la chose demeure.
Que veut dire concurrence ? Elle vise en réalisé la construction d’un marché unique européen. Nécessité de recourir à des règles de concurrence à côté, en complément des règles de liberté de circulation. Sont faites pour éliminer les droits de douane, les règles commerciales adoptées par les Etats pour réguler l’activité éco, entraves qui fragmentent le marché commun. Les règles de concurrence, elles, sont faites pour empêcher qu’une fois que les obstacles étatiques ont été éliminés, de nouveaux cloisonnements ne soient créées, non pas par les Etats mais par les entreprises ou opérateurs privés sur le marché. C’est l’objectif de combattre les barrières d’origine privées dans le cadre du marché unique européen.
Ex de barrières : entreprises s’entendent entre elles pour se répartir un marché = restriction de la concurrence. Limiter les avantages artificiels donnés aux entreprises sur le marché. Principe originel a fait consensus au moment de la rédaction du Traité de Rome instituant la CEE.
Aucune ambigüité à la base, mais les choses ont évolué : le régime de concurrence s’est chargé de nouveaux objectifs, mais surtout la surveillance opérée par les autorités communautaires sur les Etats & les entreprises s’est beaucoup renforcée. La discipline de la concurrence est très forte, et les règles de la concurrence se sont considérablement étendues, tant et si bien qu’aujourd’hui elles atteignent tous les secteurs de la vie économique et sociale y compris le secteur public. Universalisation des règles de concurrence en Europe aujourd’hui.
Les objectifs du régime européen de concurrence
- Finalités politiques et finalités économiques
Finalité politique car procède de la construction politique du marché commun, et finalité économique car mis en lumière par la théorie éco de la concurrence.
En Europe, la concurrence est d’abord un instrument de la réalisation du marché unique européen (= fusion des marchés nationaux). Très tôt, la Commission explique qu’) à travers la mise en œuvre de la pol de concurrence dont elle est chargée en Europe, il s’agit de « viser la métamorphose d’une série hétérogène de marchés nationaux isolés en un vaste marché unique européen ». C’est éviter les recloisonnements du marché unique, que les entreprises créent des obstacles qui se substituent aux obstacles étatiques.
Objectif éco : organisation d’un marché concurrentiel : création de conditions d’une économie de marché libre en Europe. Le but de toute politique de concurrence, c’est la lutte contre les concentrations de pouvoir de marché, pouvoir économique, exercés abusivement sur le marché au détriment des concurrents & des consommateurs. Lutte aussi contre le monopole, les « trust ». Politique de concurrence née aux US à la fin du XIXe siècle, 1890 : législateur américain qui adopte le Sherman Act (première grande législation anti concurrentielle contre les grands trusts US de compagnies de chemin de fer). Le droit « anti-trust » est né pour lutter contre les abus de position. Constat : un marché hyperconcentré entre les mains de plusieurs entreprises crée des positions d’abus de pouvoir. Théorie classique : seul un état de marché, de concurrence libre (CPP) permet d’obtenir des prix optimaux au bénéfice du consommateur. La concurrence apporte bcp plus d’avantages, elle permet aux entreprises de baisser les prix, favorise l’innovation technologique pour améliorer les prix, les services. Modèle de la CPP n’est pas parfait : on sait qu’il y a des cas dans lesquels la concentration de pouvoir, le dvpt d’un pouvoir de marché peut être utile au consommateur & à la société.
Ex : Cas dans lesquels seul un monopole permet d’investir suffisamment pour produire de l’innovation (long terme, coûteux etc).
Mais cas ou la concentration de pouvoirs est un mal nécessaire pour délivrer un service public, qui permet de délivrer des services non rentables dans des conditions normales de marché, nécessité d’une concentration de pouvoir, intervention économique par ex, soustraite aux règles de la concurrence. Cela peut être nécessaire pour créer des « champions européens », de grandes firmes européennes plus efficaces, mieux structurées.
Juridiquement, cela se traduit par le fait que toutes les règles de concurrence posées par le traité sont assorties d’exception. Principe à interdiction des pratique anticoncurrentielles, mais possibilité exceptionnelle dans certaines circonstances de déroger au principe. Parfois, contradiction entre les politiques de concurrence. Différentes manières de conduire ces politiques selon la conjoncture.
- Conflits d’objectifs et interprétations juridiques
à TPICE, 17 Sept 2007 : Microsoft c/ Commission
Conflit entre deux puissances éco, deux visions de la conférence. Secteur informatique, primordial dans l’éco d’aujourd’hui. Affaire débute en 1995 : Windows 95 équipe plus de 95% des ordinateurs du monde. Totale supériorité, entretenue en refusant de donner des infos à ses concurrents sur le logiciel, et en pratiquant une vente liée (ordi vendu avec Word, Windows media player). Administration Clinton lance une procédure, poursuivi par Bush qui conclut par un accord à l’amiable qui ne demande que des concessions légères au groupe, au nom de la protection de l’innovation. Implicitement : protection d’un intérêt économique vital pour les US. Commission européenne intervient à ce moment là : Microsoft opère aussi sur le territoire européen. Au terme d’une procédure & une enquête, sera plus sévère : elle condamne Microsoft à payer 500 millions d’euros en 2004, enjoint le groupe Microsoft à fournir des informations et l’oblige à cesser la vente liée (avec Windows Media Player notamment). Cette décision est attaquée par Microsoft devant le juge communautaire et le TPICE. Le juge communautaire rejette l’attaque de Microsoft et donne raison à la Commission. Gouvernement américain n’est pas d’accord, il trouve que c’est une atteinte à l’innovation. Commission répond que la protection de l’innovation, c’est diffuser le plus possible pour permettre la stimulation de l’économie.
Cas typique qui illustre bien le pb entre distinction du respect de l’innovation et abus de position dominante.
Les règles européennes de protection de la concurrence
Règles, la concurrence n’existe pas à l’état naturel, spontané. Elle a besoin d’être régulée et institutionnalisée, comme c’est le cas en Europe.
- L’interdiction des pratiques anticoncurrentielles
Le droit antitrust
Regroupe deux catégories d’interactions :
- Interdiction des ententes entre les entreprises (article 81 TCE)
Exemple : La Commission a condamné l’accord entre les banques françaises qui augmentaient conjointement le px des cartes bancaires.
- Interdiction des abus de position dominante (article 82 TCE)
Pas d’entente collective, mais entreprise a une position dominante sur le marché (non critiquable) mais en ABUSE.
En 2009, la Commission européenne a lancé une enquête contre EDF, position dominante, accusé d’avoir artificiellement augmenté les prix de l’électricité cette année. Pratique empêche les clients de se fournir auprès d’autres clients.
Le droit des concentrations
Ne trouve pas son fondement dans le traité, mais dans un règlement du 30 janvier 2004 du Conseil. Droit des fusions, d’acquisition d’une entr. par une autre. But : éviter que lors d’une fusion, une entreprise acquiert un pouvoir de marché trop important.
Par ex : en décembre 2008 : La Commission européenne a autorisé le rachat de British Energy par EDF, sous conditions.
Le droit des aides d’Etat
La concurrence peut être aidée par l’Etat si subvention, élimination des charges sociales, accorde des avantages artificiels à une entreprise sur le marché. Ceci est prohibé par l’article 87 TCE. Cela remet en cause une tradition interventionniste de l’Etat français qui a longtemps agi en matière industrielle en accordant des subventions, baisse des charges etc…
Possibilité de dérogations avec l’accord de la Commission. Ex : La commission vient d’approuver une nouvelle recapitalisation des banques.
Les procédures et le champ du contrôle
En Europe, modèle de contrôle administratif et supranational (Commission européenne). Très différent du modèle US : contrôle confié aux juridictions.
La Commission européenne est donc chargée de conduire et mettre en œuvre les procédures au niveau communautaire. En effet, bcp d’Etats à l’époque de la construction ne connaissaient par le droit de a concurrence, et l’on se méfiait d’une application nationale de ce droit. C’est pour cela qu’on a confié à la Commission ce pouvoir de contrôle : il y a une « police économique européenne » de la concurrence.
La Commission dispose de pouvoirs d’enquête, d’investigation et même de sanction en matière de concurrence. Cela veut dire qu’une concentration de dimension européenne ne peut être effectuée sans l’accord de la Commission, de même pour une aide d’Etat. Le contrôle est centralisé et très étendu. Dans l’interprétation de la CJCE et la Commission, ils considèrent qu’un office public de placement de demandeurs d’emplois est soumis aux lois de la concurrence (Alld).
Elle considère aussi que certains organismes sociaux (retraites, protection sociale) sont des entreprises au sens de la concurrence, et soumises à son droit.
Au fond les exceptions sont limitées : la cour ne soustrait aux règles de concurrence que deux types d’organisme :
- Organisations ayant des prérogatives de puissance publique
- Les organismes sociaux, de santé publique, de protection sociale, de logements sociaux… Dès lors qu’ils ont un objectif exclusivement social. Dans les fonctions économiques de ces organismes, ils sont contraints aux règles de concurrence.
L’ouverture du secteur public à la concurrence
Le dvpt de l’Etat en France est lié à l’action de service public. On sépare par nature les activités publiques des activités privées. Les personnes publiques remplissent des missions de services publics qui sont soumises au droit public. Principe d’équivalence a été remis en cause en France depuis quelques années.
Le droit communautaire a révélé et accéléré cette crise. Le droit communautaire ne donne aucune priorité à l’Etat dès lors qu’il INTERVIENT dans l’économie : il est un opérateur soumis aux règles de concurrence.
Ce n’est donc que si son action est justifiée par une nécessité impérieuse de défense des intérêts publics que celui-ci sera exempté totalement ou partiellement des règles de concurrence. L’Etat est donc constamment mis en demeure de se justifier et éventuellement de composer avec les règles de concurrence consacré par le traité.
Cela ressort dans l’article 8. Il s’applique au cas par cas toutefois, par la recherche de l’équilibre entre les intérêts publics fondamentaux et les intérêts strictement éco.
Ainsi l’arrêt CJCE Corbeau du 19 mai 1993 fait transparaître cette recherche d’équilibre. Dans cette affaire, monsieur Corbeau décide de se lancer dans une activité de courrier postal. Il considère que la régie des postes belge va à l’encontre des principes de concurrence. Faut-il donner un monopole à la Régie des postes pour compenser les services publics qui sont non-rentables (amener le courrier dans les bleds paumés belges).
A partir de cette jurisprudence, le droit communautaire distingue deux catégories de service d’intérêt général :
- Les SIEG : Service d’Intérêt Economique Général : ce sont les activités éco stratégiques, essentielles à un pays où il faut introduire une certaine dose de concurrence.
- Les SIG : Service d’Intérêt Général, qui en principe échappent totalement aux règles du commerce.
Conclusion :
Ce qu’on observe aujourd’hui est le développement d’un droit de libéralisation des industries en réseau, de la régulation. Il y a une prise de décision au cas par cas.
En revanche, en matière de SIEG, un nouveau droit de libéralisation sur les secteurs en réseau existe. Ce sont des secteurs stratégiques où il faut un équilibre entre l’ouverture à la concurrence pour faire baisser les prix. En même temps, la nécessité de rendre des services sur tout le territoire : les services universels exigent un aménagement du droit de la concurrence.
Exempe : Directive 2003/54/CE du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2003 concernant les règles communs pour le marché intérieur de l’électricité.
- OSP, Obligations de services publics imposés en entreprises à des prix abordables.
- La création d’une autorité nationale de régulmation du secteur, indépendante de l’Etat, pour gérer le secteur et surveiller le fonctionnement du marché. En France, la Commission de régulation de l’énergie ou encore, des télécommunications.